Résumé
Bien que le standard de soin dans les pays développés soit de
maintenir les patients schizophrènes sous neuroleptiques en continu,
cette pratique n’est pas soutenue par 50 ans de recherches sur les
médicaments. Une revue critique de la littérature révèle que ce
paradigme de soin aggrave le pronostic à long terme, au moins sur
l’ensemble, et que 40 % ou plus de tous les patients schizophrènes
seraient beaucoup mieux s’il n’avait pas été ainsi médicamenté. La santé
basée sur des preuves exigerait un usage sélectif des neuroleptiques,
basée sur deux principes : a) pas de neuroleptisation immédiate des
patients faisant leur première crise psychotique, b) tout patient
stabilisé par neuroleptiques devrait se voir offrir l’opportunité d’un
sevrage progressif. Ce modèle devrait augmenter significativement le
taux de rétablissement et diminuer le pourcentage de patients qui
deviennent des malades chroniques.
Introduction
Le standard de soin actuel de la schizophrénie exige que les patients
soient maintenus indéfiniment sous médicaments neuroleptiques. La
justification de cette pratique tient de recherches montrant que ces
médicaments sont efficaces dans le traitement des symptômes psychotiques
aiguës et dans la prévention de la rechute [1, 2]. Des historiens
affirment également que l’introduction de neuroleptiques dans les années
1950 a permis de vider les hôpitaux psychiatriques, et que c’est une
preuve supplémentaire des mérites de ces médicaments [3]. Cependant, les
sorties définitives des patients schizophrènes demeurent rares, et
pourraient ne pas être meilleures que celles qu’elles étaient il y a 100
ans lorsque les traitements à la mode étaient la cure thermale et l’air
frais [4-7].
Il y a un paradoxe évident dans les observations de recherche.
L’efficacité des neuroleptiques semble être bien établie, mais il y a un
manque flagrant de preuves montrant que ces médicaments ont améliorées
la vie des patients à long terme. Ce paradoxe a récemment été illustré
dans un éditorial inhabituel de Eur. Psychiatry, qui a posé
cette question : « Après cinquante ans de neuroleptiques, sommes-nous en
mesure de répondre à cette simple question : les neuroleptiques
sont-ils efficaces dans le traitement de la schizophrénie ? » [8] Un
examen attentif de la littérature scientifique fournit une réponse
surprenante. Si on s’en tient aux preuves, on peut montrer que la norme
actuelle de soins – le traitement par médication continue pour tous les
patients diagnostiqués de la sorte – fait plus mal que de bien.
Les neuroleptiques ont-ils permis la déinstitutionnalisation ?
La croyance selon laquelle l’introduction de la chlorpromazine,
commercialisé aux États-Unis sous le nom de Thorazine, a permis de vider
les hôpitaux publics découle d’une recherche effectuée par Brill et
Patton. Dans les années 1960, ils ont signalé que le nombre de patients
dans les hôpitaux psychiatriques publics aux États-Unis avait diminué de
558 600 patients en 1955 à 528 800 en 1961. Bien qu’ils ne comparent
pas les taux de sortie pour les patients traités par neuroleptiques par
rapport aux patients traités par placebo, ils concluent néanmoins que
les neuroleptiques doivent avoir joué un rôle dans le déclin, car il a
coïncidé avec leur introduction. Le fait que les deux se sont produits
en même temps a été considéré comme la preuve ultime [9, 10].
Néanmoins, il y a une évidente confusion de causes. Dans les années
1950, le Conseil des gouvernements des États des États-Unis a exhorté le
gouvernement fédéral à partager le fardeau financier des soins pour les
malades mentaux, et a proposé que « le nombre d’établissements ouverts
devait être augmenté et que d’autres ressources communautaires devait
être développés pour prendre soin des personnes ayant besoin d’aide,
mais pas d’hospitalisation » [11, 12]. Dans le cadre de ce programme,
les États ont commencé à développer des initiatives de soins
communautaires, canalisant les malades mentaux dans des établissements à
mi-chemin entre des maisons de soins et des habitations plus
conventionnelles. Ce changement dans la politique sociale pourrait
facilement être responsables de la légère baisse du nombre de patients
observé par Brill et Patton.
Bien plus, il y a un État qui a comparé le taux de sortie de patients
schizophrènes traités avec et sans médicaments, et ses résultats ne
concordent pas avec les prétentions historiques faites pour les
neuroleptiques. Dans une étude portant sur 1413 hommes schizophrènes
admis dans les hôpitaux psychiatriques de Californie et ayant fait leur
premier épisode psychotique en 1956-1957, les chercheurs ont constaté
que « les patients traités avec des médicaments ont tendance à avoir les
périodes d’hospitalisation plus longues… En outre, les hôpitaux, dans
lesquels un pourcentage plus élevé de patients schizophrènes en première
admission sont traités avec ces médicaments, ont tendance à avoir un
taux de rétention un peu plus élevé que l’ensemble des hôpitaux ». Bref,
les enquêteurs de Californie ont déterminé que les neuroleptiques, loin
de retourner rapidement les patients à la communauté, avaient plutôt empêché leur rétablissement [13].
La vrai période de désinstitutionnalisation aux États-Unis commence
en 1963 et se termine à la fin des années 1970, l’exode des patients
étant conduite par des mesures fiscales et sociales. En 1963, le
gouvernement fédéral a commencé à récupérer quelques-uns des coûts
psychiatriques en dehors des hôpitaux, et deux ans plus tard, Medicare
et Medicaid augmentait le financement fédéral pour les soins des malades
mentaux à condition que ceux-ci ne soient pas hébergés dans un hôpital
public. Naturellement, les États ont répondu en sortant massivement
leurs patients d’hôpital vers des maisons de soin privés et des refuges.
En 1972, un amendement à la loi de la sécurité sociale a autorisé le
payement des indemnités d’invalidité directement aux malades mentaux,
accélérant ainsi le transfert des patients des hôpitaux publiques vers
les institutions privées. En raison de ces changements de politique
fiscale, le nombre de patients dans les hôpitaux psychiatriques d’état a
chuté de 504 600 à 153 544 sur une période de 15 ans (1963 à 1978)
[14].
La preuve d’efficacité : l’essai crucial de NIMH
L’étude qui est encore citée aujourd’hui comme preuve de l’efficacité
des neuroleptiques pour arrêter les épisodes aigus de schizophrénie
était un essai sur 344 patients mené par l’Institut national de la santé
mentale (NIMH) dans neuf hôpitaux au début des années 1960. Au bout de
six semaines, 75 % des patients traités avec le médicament ont été
« beaucoup améliorés » ou « très nettement améliorés » par rapport aux
23 % de patients du groupe placebo. Les chercheurs ont conclu que les
neuroleptiques ne doivent plus être considérés comme de simples
« tranquillisants », mais comme des « agents antischizophréniques ». Une
panacée avait apparemment été trouvée pour cette maladie dévastatrice
[1].
Néanmoins, trois ans plus tard, les chercheurs du NIMH ont rapporté
de nouvelles données sur ces patients suivis pendant un an
supplémentaire. À leur grande surprise, ils ont constaté que « les
patients qui ont reçu le placebo étaient moins susceptibles d’être
réadmises que ceux qui ont reçu l’une des trois phénothiazines actifs »
[15]. Ce résultat a soulevé une inquiétante possibilité : alors que ces
médicaments sont efficaces à court terme, peut-être qu’ils rendent les
gens plus vulnérables biologiquement à la psychose sur le long terme, ce
qui explique les taux de réhospitalisation plus élevés dès la fin de la
première année.
Les études de NIMH sur le sevrage
Dans la foulée de ce rapport inquiétant, NIMH a mené deux études sur le sevrage. Dans chacune, les taux de rechute augmentent en corrélation avec la dose de neuroleptique prise avant le sevrage.
Dans les deux essais, 7 % seulement des patients qui étaient sous
placebo rechutent au cours des six mois suivants. 23 % des patients qui
prenaient moins de 300 mg de chlorpromazine quotidiennement rechutent
après le sevrage ; le taux grimpe à 54 % pour ceux recevant 300-500 mg
et à 65 % pour ceux recevant plus 500 mg. Les chercheurs concluent :
« La rechute est corrélée de façon significative à la dose du médicament
tranquillisant avant que le patient soit mis sous le placebo – plus la
dose est élevée, plus la probabilité de rechute est grande » [16].
Une fois de plus, les résultats suggèrent que les neuroleptiques ont
augmenté la vulnérabilité biologique des patients à la psychose.
D’autres recherches étayent ce soupçon. Même lorsque les patients
prennent leurs médicaments de manière fiable, la rechute est courante,
et les chercheurs ont rapporté en 1976 qu’il est apparu que « la rechute
pendant l’administration du médicament est plus grave et plus sévère
que lorsqu’aucun médicament n’est donné » [17]. Une étude rétrospective
de Bockoven a également montré que les médicaments rendaient les
patients chroniquement malades. Il a démontré qu’en 1947, 45 % des
patients traités selon un modèle progressiste à l’hôpital de Boston
Psychopathic n’avaient pas eu de rechute dans les cinq ans suivant leur
sortie, et que 76 % vivaient avec succès dans la communauté à la fin de
cette période de suivi. En revanche, en 1967, seuls 31 % des patients
traités aux neuroleptiques dans un centre de santé communautaire sont
restés sans rechute au cours des cinq prochaines années, et en tant que
groupe, ils étaient beaucoup plus « dépendants socialement » – sur le
plan social et sur d’autres plans – que ceux de la cohorte de 1947 [18].
Le traitement médicamenteux versus les formes expérimentales de soins
Avec l’accroissement de la polémique sur les mérites des
neuroleptiques, le NIMH a réexaminé la question de savoir si les
patients schizophrènes nouvellement admis pourraient être traitées avec
succès sans médicaments. Il y eut trois études NIMH financées et menées
dans les années 1970 qui ont examiné cette possibilité, et dans chaque
cas, les patients nouvellement admis traités sans médicaments allaient
mieux que ceux traités de manière conventionnelle1.
En 1977, Carpenter a signalé que seulement 35 % des patients non
médicamentés dans son étude rechutait un an après la sortie,
comparativement aux 45 % de ceux traités avec des neuroleptiques. Les
patients non-médicamentés ont également moins souffert de dépression,
d’émoussement des émotions, ou de ralentissement psychomoteur [20]. Un
an plus tard, Rappaport et al. [21] ont rapporté que dans un essai de 80
jeunes hommes schizophrènes admis dans un hôpital de l’État, seulement
27 % des patients traités sans neuroleptiques rechutent dans les trois
ans suivant la sortie, par rapport aux 62 % du groupe médicamenté. La
dernière étude provenait de Mosher, directeur de la recherche sur la
schizophrénie au NIMH. En 1979, il a rapporté que sur une période de
deux ans, les patients qui ont été traités sans neuroleptiques par des
non-professionnels dans une maison expérimentale avaient des taux de
rechute inférieurs au groupe contrôle traité avec des médicaments dans
un hôpital. Comme dans les autres études, Mosher indique que le groupe
des patients traités sans médicaments fonctionnaient mieux que celui des
patients qui en prenaient [22, 23]
Les trois études sont toutes arrivées à la même conclusion :
l’exposition aux neuroleptiques a augmenté l’incidence à long terme de
la rechute. Le groupe de Carpenter a ainsi posé l’énigme :
« Il ne fait aucun doute que, une fois les patients
placés sous médication, ils sont moins vulnérables à une rechute s’ils
sont maintenus sous neuroleptiques. Mais que se serait-il passé si ces
patients n’avaient jamais été traités avec ces médicaments pour
commencer ?… Nous élevons la possibilité que les médicaments
neuroleptiques peuvent rendre certains patients schizophrènes plus
vulnérables à une rechute par rapport au cours naturel de leur maladie
[20]. »
Dans les années 1970, deux médecins de l’Université McGill à
Montréal, Guy Chouinard et Barry Jones, ont proposé une explication
biologique pour expliquer pourquoi il en était ainsi. Le cerveau réagit
aux neuroleptiques – qui bloquent 70-90 % de tous les récepteurs de la
dopamine D2 dans le cerveau – comme s’il s’agissait d’une agression
pathologique. Pour compenser, les cellules dopaminergiques cérébrales
augmentent la densité de leurs récepteurs D2 de 30 % ou plus. Le cerveau
est maintenant « hypersensibles » à la dopamine, alors que ce
neurotransmetteur est suspecté d’être un médiateur de la psychose. La
personne est devenue biologiquement plus vulnérables à la psychose et
est particulièrement exposée à un risque élevé de rechute sévère si elle
cesse brusquement de prendre les médicaments. Les deux chercheurs
canadiens concluent :
Les neuroleptiques peuvent produire une hypersensibilité à
la dopamine qui conduit à la fois à la dyskinésie tardive et aux
symptômes psychotiques. Une conséquence est que la tendance à la rechute
psychotique des patients qui ont développé cette hypersensibilité n’est
pas seulement déterminé par le cours normal de la maladie… la nécessité
d’un traitement neuroleptique continue peut lui-même être d’origine
médicamenteuse [24, 25].
Ensemble, les diverses études peignent un tableau convaincant de la
façon dont les neuroleptiques diffèrent le rétablissement des malades.
La rétrospective de Bockoven et les autres expériences suggèrent toutes
que avec peu ou pas d’exposition aux neuroleptiques, au moins 40 % des
personnes qui ont souffert d’un épisode psychotique et ont été
diagnostiqués schizophrènes ne rechutent pas après avoir quitté
l’hôpital, et peut-être 65 % iront assez bien sur le long terme.
Cependant, une fois que les patients ayant eu un premier épisode
psychotique aient été mis sous neuroleptiques, un sort différent les
attend. Leurs cerveaux subissent des changements induits par les
médicaments qui vont accroître leur vulnérabilité biologique à la
psychose, et cela augmente la probabilité qu’ils deviennent des malades
chroniques.
Les études de l’Organisation Mondiale de la Santé
En 1969, l’Organisation mondiale de la Santé a lancé une étude pour
comparer les résultats thérapeutiques du traitement de la schizophrénie
dans les pays « développés » et « sous-développés ». Une fois de plus,
les résultats ont été surprenants. Les patients des trois pays pauvres
étudiés – Inde, Nigeria et Colombie – allaient considérablement mieux
après deux et cinq ans de suivis que les patients des États-Unis et des
quatre autres pays développés. Les patients étaient plus susceptibles
d’être entièrement rétablis et de bien se comporter en société – « un
exceptionnel recouvrement des capacités sociales caractérisent ces
patients », écrivirent les chercheurs de l’OMS – et seule une petite
minorité est devenue malades chroniques. Après cinq ans, environ 64 %
des patients dans les pays pauvres étaient asymptomatiques et allaient
bien. En revanche, seulement 18 % des patients des pays riches étaient
dans cette catégorie. La différence de résultats était telle que les
chercheurs ont conclu que vivre dans un pays développé était un
« indicateur clé » pour savoir si un patient schizophrène se rétablirait
jamais pleinement [26].
Ces résultats naturellement piquaient les psychiatres aux États-Unis
et dans d’autres pays riches. Face à ces résultats lamentables, beaucoup
ont fait valoir que l’étude de l’OMS était erronée et qu’un certain
nombre de patients dans les pays pauvres ne devaient pas être réellement
schizophrènes mais seulement atteints d’une forme bénigne de psychose.
Pour contrer ces arguments, l’OMS a mené une étude qui a comparé les
résultats thérapeutiques sur deux ans dans 10 pays, et elle a porté sur
des schizophrènes nouvellement internés, tous diagnostiqués selon des
critères occidentaux. Les résultats ont été les mêmes. « Les résultats
selon lesquels on doit s’attendre à un meilleur pronostic dans les pays
en développement ont été confirmés », écrivirent les chercheurs. Dans
les pays pauvres, 63 % des schizophrènes avait de bons résultats.
Seulement un peu plus d’un tiers est devenu une maladie chronique. Dans
les pays riches, le rapport des bons à mauvais résultats était presque
exactement inverse. Seulement 37 % ont eu de bons résultats, et les
patients restants n’ont pas obtenu des résultats thérapeutiques aussi
bons [27].
Les enquêteurs de l’OMS n’ont pas révélé la cause de la forte
disparité dans ces résultats. Cependant, ils notent qu’il y avait une
différence dans les soins médicaux qui étaient fournis. Les médecins
dans les pays pauvres ne disposent généralement pas de neuroleptiques,
alors que les médecins dans les pays riches en ont. Dans les pays
pauvres, seulement 16 % des patients étaient maintenus sous
neuroleptiques. Dans les pays développés, 61 % des patients étaient
gardés sous de tels médicaments.
Une fois de plus, les résultats de recherche racontent la même
histoire. Dans les études de l’OMS, il y avait une corrélation entre
l’utilisation des médicaments sur une base continue et de piètres
résultats à long terme.
Études IRM
Alors que la plupart des chercheurs ont utilisé l’IRM pour enquêter
sur les causes possibles de la schizophrénie, un petit nombre a utilisé
cette technologie pour étudier les effets des neuroleptiques sur le
cerveau. Ces enquêteurs ont constaté que les médicaments provoquent une
atrophie du cortex cérébral et un élargissement de ganglions de la base
[28-30]. De plus, les chercheurs de l’Université de Pennsylvanie ont
rapporté en 1998 que l’élargissement induit par le médicament des
ganglions de la base est « associée à une plus grande sévérité des
symptômes à la fois négatifs et positifs » [31]. En d’autres termes, ils
ont constaté que les médicaments provoquent des changements dans le
cerveau associés à une aggravation des symptômes que ces médicaments sont censés atténuer.
Études sur la rechute
Comme indiqué précédemment, la preuve de l’efficacité des
neuroleptiques est en fait double. Tout d’abord, l’essai NIMH dans les
années 1960 a révélé que les neuroleptiques sont plus efficaces que le
placebo dans la réduction des épisodes aigus de psychose. Ensuite, on a
prétendu que ces médicaments étaient capables de prévenir la rechute. En
1995, Gilbert a examiné 66 études de rechute, impliquant 4365 patients,
et résumait : 53 % des patients sevrés des neuroleptiques rechutent
dans les 10 mois, contre 16 % de ceux maintenus sous neuroleptiques.
« L’efficacité de ces médicaments dans la réduction du risque de rechute
psychotique est bien documenté » écrit-elle [2].
À première vue, cette conclusion semble contredire les recherches
montrant que les médicaments fabriquent des patients souffrant de
maladies chroniques. Il y a une réponse à ce casse-tête cependant, et il
est un révélateur. Les études menées par Rappaport, Mosher et Carpenter
ont impliqués des patients qui, au début de l’expérience, n’étaient pas
sous neuroleptiques, et ont ensuite été traitées soit avec un placebo
soit avec un neuroleptique. Et dans ces études, les taux de rechute
étaient plus faibles pour le groupe placebo. En revanche, les 66 études
examinées par Gilbert étaient des études de sevrage. Dans les
études qu’elle a analysées, les patients qui avaient été stabilisés par
les neuroleptiques ont été répartis en deux cohortes : ceux qui
continueraient à prendre les médicaments et les autres qui arrêteraient,
et ces études ont démontré de manière fiable que les gens sevrés aux
neuroleptiques étaient d’avantage susceptibles de redevenir malades.
Ainsi, la littérature suggère que les taux de rechute se répartissent
en trois groupes : le plus bas pour ceux qui n’ont jamais pris de
neuroleptiques, puis ceux qui prennent les médicaments de façon
continue, enfin ceux qui sont sevrés des neuroleptiques. Pourtant, même
cette image est trompeuse.
Tout d’abord, pour la plupart, les études sur le sevrage ont été
menées dans un groupe restreint de personnes qui avaient une « bonne
réponse » aux neuroleptiques, plutôt que dans la population générale des
patients. Dans le monde réel, jusqu’à 30 % des patients hospitalisés ne
répondent pas aux neuroleptiques. Parmi ceux qui répondent au
traitement et sortent de l’hôpital (70 %), plus d’un tiers rechute dans
le 12 prochains mois et doivent être réadmis (23 %), même s’ils prennent
leurs médicaments de façon fiable. Ainsi, moins de 50 % des personnes
qui souffrent d’un désordre schizophrénique répondent aux neuroleptiques
classiques et restent sans rechute aussi longtemps que un an ; mais les
études de rechute, dans une large mesure, ont été menées sur le groupe
des patients qui ont une bonne réponse thérapeutique aux neuroleptiques.
En 1998, Hogarty a souligné comment cette conception d’étude a conduit à
une compréhension erronée des vrais taux de rechute avec les
neuroleptiques : « Une réévaluation de la littérature suggère un taux de
rechute de 40 % après un an, avec un taux sensiblement plus élevé chez
les patients qui vivent dans des environnements stressants, plutôt que
les premières estimations de 16 % »[32].
Dans le même temps, les études de rechute ont été conçus d’une
manière qui exagéraient le risque de rechute dans les groupes de
patients sevrés. En réponse à Gilbert, Baldessarini a réanalysé les
mêmes 66 études, seulement il a divisé la cohorte des patients sevrés en
un groupe « sevrage brutal » et un autre « sevrage progressif ». Il a
déterminé que le taux de rechute dans le groupe de sevrage brutal était trois fois plus élevé que
dans le groupe de sevrage progressif [33]. En d’autres termes, c’était
l’arrêt brutal qui avait causé l’accroissement du risque de rechute. En
effet, dans une autre revue de la littérature du risque de rechute,
Baldessarini a constaté que seul un tiers des patients atteints de
schizophrénie qui ont été sevrés progressivement rechutaient dans les
six mois, et que ceux qui ont atteint le stade de six mois sans retomber
malade avaient de bonne chance de rester ainsi indéfiniment. « Le
risque de rechute tardif est remarquablement limité » conclut-il [34].
Les études sur la rechute sont cités à l’appui d’un paradigme de
soins qui met l’accent sur la thérapie médicamenteuse continue pour les
patients atteints de schizophrénie. Mais après examen, une nouvelle
image apparaît. Le taux de rechute pendant la première année pour les
patients du monde réel maintenu sous neuroleptiques est de 40 %, tandis
que le taux pour les patients progressivement sevrés des médicaments est
de 33 %. Ainsi, une fois que la mauvaise conception de l’essai est
éliminée, la preuve de l’efficacité de la médication continue disparaît.
Dans le même temps, la preuve semble montrer que la majorité des
patients – les deux tiers dans les études de sevrage progressif – peut
très bien vivre sans médicament.
Faire plus de mal que de bien
Bien que cet examen des neuroleptiques puisse paraître surprenant,
les résultats de la recherche sont en fait assez cohérents. L’étude
cruciale de la NIMH dans les années 1960 a constaté que les médicaments
avaient un avantage à court terme, mais qu’à long terme, les patients
sous neuroleptiques avaient des taux de rechute plus élevés. De même,
dans son étude rétrospective, Bockoven a constaté que les patients
traités avec des neuroleptiques étaient plus susceptibles de devenir des
malades chroniques. Les expériences menées par Carpenter, Mosher et
Rappaport ont toutes montré des taux plus élevés de rechute pour les
patients traités avec des neuroleptiques, et, en 1979, des chercheurs
canadiens ont mis sur pied une explication biologique pour expliquer
pourquoi cela était ainsi. L’Organisation Mondiale de la Santé a signalé
des taux de rétablissement plus élevés dans les pays pauvres où les
patients ne sont pas entretenus régulièrement sous neuroleptiques.
Enfin, les études IRM par des chercheurs de l’Université de Pennsylvanie
ont confirmé le problème de la chronicité induite par le médicament
d’une manière convaincante. Le traitement par neuroleptique a provoqué
un changement pathologique dans le cerveau associé à une aggravation des
symptômes – ce qui est un exemple convaincant de cause à effet.
Ainsi, il y a une accumulation de preuves montrant que les
neuroleptiques classiques, sur le long terme, augmentent la probabilité
qu’une personne devienne malade chronique. Ce résultat est
particulièrement problématique lorsque l’on considère que les
médicaments provoquent également une large gamme d’effets secondaires
préoccupants, y compris le syndrome malin des neuroleptiques (mortel),
symptômes parkinsoniens, et la dyskinésie tardive. Les patients
maintenus sous neuroleptiques classiques ont aussi à se soucier de la
cécité, de caillots sanguins mortels, de coups de chaleur, du gonflement
des seins, de fuite des seins, de l’impuissance, de l’obésité, du
dysfonctionnement sexuel, des troubles sanguins, des éruptions cutanées
douloureuses, des convulsions, du diabète, et de la mort précoce
[35-40].
Une fois tous ces facteurs sont pris en compte, il est difficile de
conclure que les neuroleptiques classiques sont thérapeutiquement
neutres. Au lieu de cela, les observations de la recherche montre le mal
qui est fait, et le dossier est cohérent à travers près de 50 années de
recherche. [Voir « la frise chronologique de l’échec » dans le document
original, annexe A, non traduite]
Un meilleur modèle : l’utilisation sélective des neuroleptiques
À tout le moins, cette histoire fait valoir que le meilleur modèle de
soins impliquerait l’utilisation sélective de neuroleptiques.
L’objectif serait de minimiser leur utilisation. Plusieurs chercheurs en
Europe ont élaboré des programmes basés sur cet objectif, et dans tous
les cas, ils ont rapporté de bons résultats. En Suisse, Ciompi a établi
une maison sur le modèle de projet de Soteria de Mosher, et en 1992, il a
conclu que les patients présentant un premier épisode psychotique
traités sans aucun ou avec de très faibles doses de médicaments « ont
démontré des résultats significativement meilleurs » que les patients
traités classiquement [41]. En Suède, Cullberg a rapporté que 55 % des
patients reçus après un premier épisode psychotique dans un programme de
soin expérimental étaient sevrés avec succès au bout de trois ans,
tandis que les autres étaient maintenus sous des doses extrêmement
faibles de la chlorpromazine. En outre, les patients traités de cette
manière ont passé moins de jours à l’hôpital que les patients traités de
façon conventionnelle au cours de la période de suivi [42, 43].
Lehtinen et ses collègues en Finlande ont maintenant les résultats de
cinq ans d’une étude qui a impliqué le traitement des patients
présentant un premier épisode psychotique sans neuroleptiques pour les
trois premières semaines, puis de lancer le traitement neuroleptique
qu’en cas « d’absolue nécessité ». Au bout de cinq ans, 37 % du groupe
expérimental n’avait jamais été exposé aux neuroleptiques, et 88 % n’ont
jamais été réhospitalisés au cours de la période de suivi de deux à
cinq ans [44, 45].
Ces résultats sont bien meilleurs que tout ce qui a été réalisé aux
États-Unis en suivant le modèle standard de médication continue. En
effet, dans sa méta-analyse de ces études expérimentales, John Bola de
l’Université de Californie du Sud a conclu que la plupart « montrent de
meilleurs résultats à long terme pour les sujets non médicamentés » [23]
Les atypiques : l’aube d’une nouvelle aire ?
Certes, l’observation de mauvais résultats à long terme revue ici a
été le produit des neuroleptiques classiques. Les mauvais résultats
peuvent également refléter les pratiques de prescription aux États-Unis
qui, jusqu’à la fin des années 1980, impliquaient de mettre les patients
sous hautes doses. Les observations de recherche à long terme pour la
clozapine et d’autres antipsychotiques atypiques comme rispéridone et
l’olanzapine n’ont pas encore été écrites.
On espère que ces nouveaux médicaments mèneront à de meilleurs
résultats, mais il y a des raisons d’être sceptiques. Comme il est
maintenant largement reconnu, les essais cliniques des neuroleptiques
atypiques ont été biaisées lors de la conception d’études les opposant
aux anciens neuroleptiques [et non à des placebos], et donc il n’y a
aucune preuve convaincante que les nouveaux neuroleptiques sont vraiment
mieux [46]. Tandis que le risque de dyskinésie tardive pourrait être
réduit avec les antipsychotiques atypiques, ils apportent leur propre
lot de nouveaux problèmes, comme un risque accru d’obésité,
d’hyperglycémie, de diabète et de pancréatite [47-49]. Ensemble, ces
effets secondaires soulèvent la crainte que les antipsychotiques
atypiques induisent régulièrement des dysfonctionnements métaboliques
d’un certain effet, et donc que leur utilisation à long terme conduira à
une mort précoce. Les antipsychotiques atypiques ont également été
dénoncés pour causer une augmentation des récepteurs D2, tout comme les
anciens, et que l’on croit être le mécanisme qui rend les patients
médicamentés biologiquement plus vulnérables à la psychose [50].
Résumé
L’histoire de la médecine est remplie d’exemples de thérapies qui ont
été adoptées avec enthousiasme pour une période et puis plus tard jetés
comme nuisibles. Un examen scientifique des preuves est censé nous
sauver de cette folie aujourd’hui. Et la science a en effet fourni des
données de recherche pour guider les pratiques de prescription. Ces
preuves révèlent que le maintien de tous les patients atteints de
schizophrénie sous neuroleptiques produit de mauvais résultats à long
terme, et qu’il y a un grand groupe de patients – au moins 40 % de
toutes les personnes diagnostiquées schizophrènes – qui iraient mieux
s’il n’avait jamais été exposé aux neuroleptiques, ou, à défaut, aurait
été encouragés à se sevrer progressivement. (Le pourcentage de patients
diagnostiqués avec un trouble schizo-affectif, ou une forme atténuée de
psychose qui pourrait bien vivre sans médicament est sans aucun doute
beaucoup plus élevé.)
Cette conclusion n’est pas nouvelle, soit. Il y a près de 25 ans,
Jonathan Cole, l’une des figures pionnières en psychopharmacologie, a
publié un article au titre provocateur « Traitement neuroleptique de
maintenance : le remède est-il pire que le mal ? » Après avoir examiné
les données de recherche, il a conclu que « on devrait tenter de
déterminer la faisabilité d’un sevrage pour chaque patient »[17]. Les
preuves appuient une norme de soins qui implique le sevrage progressif.
Les observations de recherche sur les neuroleptiques – et plus
particulièrement les études de l’OMS et l’étude IRM par les chercheurs
de l’Université de Pennsylvanie – confirme depuis longtemps la sagesse
de ses conseils.
En effet, l’étude à long terme de Harding montre que le sevrage
progressif est une étape essentielle sur la voie du rétablissement
complet. Elle a constaté que un tiers des patients atteints de
schizophrénie sortis d’un hôpital de l’État du Vermont dans les années
1950 ont été complètement rétablis trente ans plus tard, et que ce
groupe partage une caractéristique : tous avaient depuis longtemps cessé
de prendre des neuroleptiques [51]. Elle a conclu que le commandement
selon lequel les patients devaient prendre des médicaments toute leur
vie était un « mythe » et que, dans la « réalité il pourrait y avoir
seulement un petit pourcentage qui ont réellement besoin de prendre des
médicaments indéfiniment » [52].
Pourtant, en dépit de tous ces éléments de preuve, aujourd’hui, il
n’y a presque pas eu de discussion au sein de la psychiatrie sur
l’adoption de pratiques qui impliqueraient l’usage de neuroleptiques de
manière sélective, et qui intégrerait le sevrage progressif dans la
norme de soins. Au lieu de cela, la psychiatrie se déplace dans la
direction opposée et prescrire des neuroleptiques à une population de
patients toujours plus large, y compris ceux dits simplement « à
risque » de développer une schizophrénie. Bien que cette expansion de
l’utilisation des neuroleptiques sert des intérêts financiers évidents,
c’est un traitement qui nuit certainement beaucoup.
Annexe A : La chronologie de l’échec
Préclinique
1883 : Les phénothiazines sont développées comme colorants synthétiques.
1934 : Le Département de l’Agriculture des États-Unis développe les phénothiazines, utilisés comme insecticides.
1949 : Les phénothiazines rendent les rats incapables de grimper à une corde.
1950 : Rhone Poulenc synthétise la chlorpromazine, une phénothiazine, utilisée comme anesthésique.
Histoire clinique / neuroleptiques typiques
1954 : La chlorpromazine, commercialisée aux États-Unis sous le nom de Thorazine, induit des symptômes parkinsoniens.
1955 : La chlorpromazine induit des symptômes similaires à l’encéphalite léthargique.
1959 : Premiers rapports concernant les troubles moteurs permanents
provoqués par les neuroleptiques, plus tard appelé dyskinésie tardive.
1960 : Des médecins français décrivent une réaction toxique
potentiellement mortelle aux neuroleptiques, plus tard appelée syndrome
malin des neuroleptiques.
1962 : Le Département d’Hygiène Mentale de Californie montre que la
chlorpromazine et d’autres neuroleptiques allongent les durées
d’hospitalisation.
1963 : Une étude collaborative de six semaines du NIMH conclut que
les neuroleptiques sont des médicaments « anti-schizophréniques » sûrs
et efficaces.
1964 : Les neuroleptiques provoquent une détérioration des capacités d’apprentissage chez l’homme et l’animal.
1965 : Après un an de suivi, l’étude collaborative du NIMH montre que
les patients traités avec des médicaments sont plus susceptibles d’être
ré-hospitalisés que les patients sous placebo.
1968 : Dans une étude sur le sevrage, le NIMH constate que les taux
de rechute augmentent en relation directe avec le dosage des
médicaments. Plus le dosage initial est élevé, plus le taux de rechute
est important.
1972 : Un parallèle est fait entre la dyskinésie tardive et la
maladie de Huntington, autrement appelée « lésions cérébrales
post-encéphaliques ».
1974 : Des chercheurs de Boston montrent que les taux de rechute
étaient plus bas avant l’ère des neuroleptiques, et que les patients
traités avec des médicaments sont plus susceptibles de devenir
socialement dépendants.
1977 : Une étude randomisée du NIMH montre que les patients
schizophrènes non-médiqués ont un taux de rechute de seulement 35 % un
an après avoir quitté l’hôpital, tandis que ceux traités avec des
médicaments ont un taux de rechute de 45 %.
1978 : L’enquêteur californien Maurice Rappaport rapporte que les
patients traités sans neuroleptiques ont des résultats cliniques
nettement supérieurs dans un délai de trois ans. Seuls 27 % des patients
non-médiqués rechutent dans les trois ans après la sortie de l’hôpital,
tandis que les patients médiqués rechutent dans 62 % des cas.
1978 : Des chercheurs canadiens décrivent des changements induits par
les médicaments dans le cerveau qui rendent les patients plus
vulnérables à la rechute, qu’ils appellent « psychose d’hypersensibilité
induite par les neuroleptiques ».
1978 : Les neuroleptiques provoquent la mort de 10 % des cellules dans le cerveau des rats.
1979 : On estime la prévalence de la dyskinésie tardive chez les patients traités avec des médicaments entre 24 % et 56 %.
1979 : La dyskinésie tardive est associée à une déficience cognitive.
1979 : Loren Mosher, chef des études sur la schizophrénie au NIMH,
rapporte que les patients de Soteria traités sans neuroleptiques ont des
résultats supérieurs après un et deux ans.
1980 : Les chercheurs de NIMH mettent en évidence une augmentation de
« l’émoussement affectif » et du « retrait émotionnel » des patients
traités avec des médicaments, et que les neuroleptiques n’améliorent pas
les « aptitudes sociales » de ces patients.
1982 : Les médicaments anticholinergiques utilisés pour traiter les
symptômes parkinsoniens induits par les neuroleptiques aggravent la
déficience cognitive.
1985 : L’akathisie induite par les médicaments est associé à une plus grande prévalence du suicide.
1985 : Plusieurs affaires font le lien entre l’akathisie induite par les médicaments et des homicides violents.
1987 : La dyskinésie tardive est associée à une aggravation des
symptômes négatifs, à des difficultés posturales, à des troubles de
l’élocution, à une détérioration des capacités psychosociales et à un
déficit de la mémoire. Les chercheurs concluent qu’il peut s’agir d’un
« trouble à la fois moteur et démentiel ».
1992 : L’Organisation Mondiale de la Santé montre que le traitement
de la schizophrénie dans les pays pauvres donne des résultats bien
supérieurs, où seuls 16 % des patients sont maintenus continuellement
sous neuroleptiques. L’OMS conclue que vivre dans une nation développée
est un « prédicteur fort » qu’un patient ne se rétablira jamais
complètement.
1992 : Des chercheurs admettent que les neuroleptiques provoquent une
pathologie reconnaissable, qu’ils nomment « syndrome déficitaire induit
par les neuroleptiques ». En plus de la maladie de Parkinson, de
l’akathisie, de l’émoussement affectif et de la dyskinésie tardive, les
patients traités avec des neuroleptiques souffrent d’un accroissement de
l’incidence de la cécité, des caillots sanguins mortels, de l’arythmie,
des coups de chaleur, des seins qui gonflent, des fuites de poitrines,
de l’impuissance, de l’obésité, des troubles sexuels, des troubles du
système circulatoire, des éruptions cutanées, des convulsions et de la
mort prématurée.
1994 : on observe que les neuroleptiques provoquent une augmentation du volume du noyau caudé dans le cerveau.
1994 : Des enquêteurs de Harvard rapportent que les résultats
cliniques dans le traitement de la schizophrénie aux États-Unis semblent
s’être détériorés au cours des 20 dernières années, et qu’ils ne sont
désormais pas meilleurs que dans les premières décennies du 20e siècle.
1995 : Au cours des deux années suivant la sortie de l’hôpital, le
taux de rechute des patients schizophrènes « du monde réel » traités
avec des neuroleptiques serait supérieur à 80 %, ce qui est beaucoup
plus élevé que dans l’ère pré-neuroleptique.
1995 : La « qualité de vie » des patients traités avec des médicaments est jugée « très pauvres ».
1998 : Des études IRM montrent que les neuroleptiques provoquent une
hypertrophie du noyau caudé, du putamen et du thalamus dans le cerveau,
« associée à une plus grande sévérité des symptômes négatifs et positifs ».
1998 : La consommation de neuroleptiques est associée à une atrophie du cortex cérébral.
1998 : Des chercheurs de Harvard concluent que le « stress oxydatif »
peut être le processus par lequel les neuroleptiques causent des
dommages neuronaux dans le cerveau.
1998 : La combinaison de deux neuroleptiques ou plus augmente le risque de mort précoce.
2000 : La consommation de neuroleptiques est associée à une augmentation des caillots sanguins mortels.
2003 : La consommation de neuroleptiques atypiques est associée à un
risque accru d’obésité, d’hyperglycémie, de diabète et de pancréatite.
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1 Au début des années 1960, May a mené une étude qui a comparé cinq
formes de traitement : médicaments, électrochocs, psychothérapie,
psychothérapie plus médicaments, et thérapie par l’environnement. Sur le
court terme, les résultats étaient meilleurs pour les patients traités
par médicaments. En conséquence, l’étude a été citée comme une preuve
selon laquelle les patients schizophrènes ne pouvaient pas être traités
avec une psychothérapie. Cependant, les résultats à long terme
racontaient une histoire plus nuancée. 59 % des patients initialement
traités avec la thérapie environnementale sans médicaments ont été
libérés avec succès dans la période initiale de l’étude, et ce groupe
« a fonctionné au cours de la période de suivi au moins aussi bien,
sinon mieux, que les patients traités avec succès avec les autres
méthodes ». Ainsi, l’étude de May suggère que la majorité des patients
de premier épisode psychotique iraient mieux sur le long terme s’ils
étaient initialement traités avec la « thérapie par l’environnement »
plutôt qu’avec des médicaments [19].